Peau d’âne
Contrainte à l’exil pour fuir son père, Peau d’âne va découvrir, sous la protection de sa marraine la fée, qui elle est. Au bout de ce voyage, elle découvrira le sens de l’amour véritable. Pourquoi écrire une adaptation du conte de Charles Perrault ?
Le conte de fée est riche de symboles. Construit sur les allégories et les images, il s’ancre dans l’esprit, permettant à l’enfant de se plonger dans un monde féerique et à l’adulte de faire revivre ses souvenirs, de recevoir, peut-être, une nouvelle compréhension à la lumière de son expérience.
Peau d’âne, conte d’une grande richesse, a traversé les siècles et surprend par son universalité. Il m’a semblé juste de rester fidèle à la construction narrative de Charles Perrault. Après plusieurs mois de recherche sur les valeurs symboliques de ce conte, je me suis intéressé aux adaptations existantes.
Celle d’Olivier Tchang Tchong pour le Théâtre du peuple a particulièrement retenu mon attention. Par la profondeur de ses personnages, son rythme, sa modernité, cette version respecte les éléments essentiels du conte et en propose une vision moderne.
Ecrit comme une partition musicale, avec un souci permanent des rythmes et contre-rythmes, le texte que nous avons décidé de mettre en scène distille quelques références aux auteurs du 20ème siècle (Sartre, Ionesco, Anouilh…) mais aussi aux auteurs classiques (Molière, Marivaux…).
Intention de mise en scène
Un échiquier qui ne dit pas son nom : un damier noir et blanc qui rappelle l’échiquier mais dont les formes disproportionnées proposent de brouiller les codes (scénographie : Anne Jourdren). Les déplacements des personnages (la diagonale du fou pour la fée, les déplacements du cavalier pour le Prince, ceux du pion pour l’homme, ceux de la Reine pour Peau d’âne) permettent de comprendre que l’objectif de l’intrigue est le refus de l’inacceptable, la mise en échec du Roi.
Même les déplacements du Roi sont, au départ, ceux d’un roi de jeu d’échecs. Pourtant, ils deviennent progressivement plus libres, symbolisant le sentiment de toute puissance que le Roi pense, de façon illusoire, avoir sur sa fille.
Les accessoires sont répartis dans l’espace, permettant aux spectateurs d’accompagner les personnages dans une coulisse visible et viennent, au fil de l’intrigue, s’animer sur le damier. Les acteurs sont dans l’ombre dès le démarrage du spectacle, personnifications, à travers chaque personnage, d’un inconscient. Seule l’interprète de Peau d’âne occupe déjà le damier. Elle est seule en lumière, dans une ambiance intimiste qui nous permet de découvrir son rêve secret : la rencontre de l’homme idéal.
La création musicale ‘créé par Gaela Harpen’co), à la harpe, propose une double lecture des sentiments de Peau d’âne : entendre les réactions du personnage aux différentes situations à travers le texte et imaginer ce qu’elle n’est pas capable de manifester à travers la musique, comme une expression de ses sentiments enfouis. Un poème et une chanson en début de spectacle (écrits par Théodore Lefeuvre), une autre à la fin, permettent de mettre en opposition l’amour idéalisé (chanson de Peau d’âne) et l’expression d’un amour concret (duo du Prince et de Peau d’âne).
La mise en scène permet de mettre en lumière l’alternance entre mouvement et immobilité. La demande en mariage du père à sa fille est marqué par un instant figé. Cependant, la fée des lilas commence à déposer des carrés d’herbes sur les carreaux noirs du damier, installant le chemin qui conduira Peau d’âne à se libérer de l’oppression de son père. Désormais, la fée, le Prince et Peau d’âne feront évoluer ces espaces de liberté dans un mouvement répété qui ne s’interrompt que pour marquer le doute et la peur des personnages.
Cette immobilité subie à différents moments de l’intrigue deviendra, au moment de l’union du Prince et de Peau d’âne, un instant de respect solennel. Les costumes (concus et réalisé par Aurélie Penuizic), inspirés par l’univers des contes de fée ancré dans l’inconscient collectif, viennent nourrir les images proposées par la mise en scène.
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